Des milliers de français meurent d’obésité chaque année quand la ligue sportive la plus populaire en France promeut des burgers et des canapés. Oui, c’est un raccourci facile et largement contestable pour attaquer le football français sur la base de ses « partenariats titres » successifs avec Conforama puis Uber Eats. Pourtant, cette grossière contradiction a le mérite de nous ouvrir à un questionnement plus large et bien moins démagogique. Quel message un partenariat majeur envoie il aux fans ? Dans un contexte où la LFP pense à revoir le branding de ses championnats, répondre à cette question pourrait participer à faire de nos championnats nationaux la marque internationalement reconnue que le football français mérite.
D’un point de vue pragmatique la ligue à tout bon. Pour elle le football pro c’est un programme télévisé. Ça parait donc évident, le lieu de consommation du football, c’est le salon. Mais pour la LFP le football pro c’est aussi un sport de grande consommation. Vous êtes un consommateur avec un salon et une télé ? Bingo, vous êtes la cible de la ligue 1.
Dans l’immédiat, cette stratégie de banalisation est géniale. Elle met toutes les plus grandes marques dans la boucle de l’appel d’offre, et permet d’entrevoir un juteux contrat pour un nouveau partenaire titre. Mais une vision aussi plate de ce que représente le football ne fera jamais une grande marque.
Quelle est la vision de la marque ligue 1 et qu’est devenue « la ligue des talents » ? En proposant le football français comme un simple moment de consommation médiatique, rien ne le différencie plus de ses concurrents européens. La ligue 1 n’est pas une vraie marque de football. Alors non, personne n’écoutera jamais Spotify en regardant un match du Barça et les fans du PSG regardants les matchs depuis un avions Qatar Airways se compteront toujours sur les doigts d’une main. Pourtant, c’est précisément la proposition d’expérience culturelle du FC Barcelone comme la vision du luxe internationale que propose le Paris Saint-Germain, qui en font des marques qui ont un sens. La dimension aspirationnelle portée par ses marques les faits grandir, être comprises et aimées. Un jour peut-être, la ligue 1 aura son odeur, son gout, sa couleur. Alors peut-être, on pourra revendiquer le fait de l’aimer pour son style comme on aime la Liga, la Premier League, la Bundesliga ou la Série A.
Il faudra comprendre que le fan de football est assurément plus qu’une personne dans un salon qui dévore des burgers. Il est peut-être aussi un amoureux de haricots, un fan de parcs d’attractions, féru d’art et rêvant de voyage. En tous cas, devant le football, c’est un rêveur. En le ramenant à la réalité de son canapé, on détruit son évasion hebdomadaire et celle de plusieurs millions de ces français qui travaillent. La richesse du football français c’est celle de ces centaines de milliers de quidams, dont la ferveur descend des gradins jusqu’à faire trembler la plus grande star de l’histoire de ce sport. C’est l’assourdissante fierté de chacune des régions françaises, qui résonne chaque week-end, de Lens à Marseille en passant par Strasbourg. Le football français c’est une atmosphère latine unique que nous envie toute l’Europe. Les marque de sport sont des étendards, la ligue 1 doit porter haut notre utopie culturelle. Rappeler au monde entier que la « Farmer League » sera à jamais le championnat du plus bel endroit du monde.